deuxième volet du diptyque : MOVE /
Titre : | MOVE / au féminin |
Concept / Danse : | Eva Klimackova |
Musique : | Ayel Ramos, Nina Simone |
Lumières : | Yann Le Bras |
Durée : | 35 min |
Production : cie E7KA Co-production : Les Petites Scènes Ouvertes Avec le soutien de : Pacifique / CDC Grenoble, Journées Danse Dense / Pantin, Ménagerie de verre / Studio Lab Paris, Canaldanse / Paris
MOVE / au féminin
J’ai écrit MOVE / au masculin pour un homme. En reprenant son rôle, en me glissant dans un corps masculin, la tension androgyne et l’étrangeté d’un corps indéfinissable se sont accentuées. J’ai souhaité prolonger ma recherche et explorer plus loin cette tension. MOVE / au féminin, création 2014, s’inscrit dans mon proccessus global de recherche d’un vocabulaire spécifique du corps humain dans son étrangété. Masculin, féminin, animalité, corps du futur ou du passé sont des matiéres en mutation perpétuelles ; tout corps est un corps étranger.
Cassandre / janvier 2014 / par Thomas Hahn
ARCHAÏQUE ET FUTURISTE
Et voici enfin ce qu’on a l’habitude, aujourd’hui, d’appeler « performance », à savoir ce qui est fait par des danseurs, qui rappelle la danse et qui pourtant ce soustrait à ce qu’on a l’habitude d’appeler « danse ». Et en plus, c’est beau! Attachée à une longue corde et pourtant libre comme l’air, Eva Klimackova traverse la scène dans une combinaison dorée d’origine spatiale ou utérine. Ce petit corps, caché dans un habit un brin surdimensionné et à connotation masculine, voilà qui met subtilement les genres en tension. Jusqu’à ce quelle se dévoile, tel un mannequin, une athlète ou un soldat, c’est selon. Des images les plus cosmiques et archaïques aux plus futuristes et glamoureuses, Klimackova traverse et fusionne les archétypes dans la plus grande simplicité en s’amusant de tous les registres kitsch et en les saluant de son nuage. MOVE / est une révélation et en même temps presque un classique.
L’article écrit par Thomas Hahn en octobre 2014
MOVE / d’Eva Klimackova crée cette ambigüité plastique qui est source de beauté et de mystère, grâce à une combinaison dorée qui cache et révèle les inteprètes. Il faut ici parler de naissance d’un diptyque, car cette tenue de cosmonaute fantasmagorique relève autant d’une plastique foetale. Dans la première partie, « au masculin », cette peau d’ours scintillante est habitée par Waldemar Kretchkowsky. L’année dernière, l’interprète d’origine l’avait pourtant « prêtée » à sa chorégraphe pour une interprétation ramarquablement différente de la même partition gestuelle. S’établissait alors une zone d’ombre intérieure, une ambiguïté plastique et sexuée, alors qu’avec Kretchkowsky le corps masculin se révèle complètement. Le mystère ne se place plus à l’intérieur mais dans la relation au monde. Kretchkowsky donne à voir l’identité masculine et son héroïsme fantasmé. Mais l’aspiration à la puissance est traversée par des doutes intimes, des interrogations sur la vraie place de cette énergie. C’est le rêve qui est au centre, jusqu’à un retour au stade enfantin.
En guisse de réponse, Klimackova danse à la suite du premier solo le MOVE / au féminin. A l’écrit, ce va-et-vient peut semer une certaine confusion. Sur scène, le diptyque n’est que source de clarification. La nouvelle création, MOVE / au féminin révèle l’identité féminine, là aussi sans stéréotypes ou caricatures, en partant d’une sensibilité individuelle pour aller vers une vérité profonde. Le lien avec le solo masculin se fait grâce au pyjama cosmique, mais Klimackova s’en extrait pour aller vers un état qui n’est pas sans rappeler le butô. L’intérpretation de la partie masculine par Klimackova et le diptyque aboutissent donc à des résultats parfaitement opposées, passant de l’androgyne à des voyages jusqu’au bout du masculin et du féminin.