OUVRIR LE TEMPS (création 2016)

Titre : OUVRIR LE TEMPS 
Concept : EVA KLIMACKOVA en collaboration avec Laurent Goldring
Danse : Eva Klimackova
Musique : poésie de Ghérasim Luca
Lumières : Yann Le Bras
Durée : 37 minutes

Production : cie E7KA  Co-production : CCN d’Orléans (dans le cadre de « l’accueil studio 2015 » Ministère de la Culture et de la Communication, DRAC Centre Val de Loire dans le cadre « d’Aide au projet 2016 », International Visegrad Fund  Avec le soutien de : La Briqueterie CDC Val de Marne, Ménagerie de verre dans le cadre de StudioLAB, Se.s.ta Prague, Institut slovaque de Paris

Le spectacle et/ou les ateliers sont finançables via la part scolaire du PASS CULTURE.

Dans « Ouvrir le temps » Eva Klimackova rencontre le plasticien Laurent Goldring et la poésie de Ghérasim Luca pour livrer une danse sur la paradoxale connivence des gestes et des langues. Entre langage chorégraphique et langage poétique se tisse, dans ce solo épuré et minimaliste, un lien qui met en relief les recherches actuelles de la compagnie E7KA sur la façon dont les sens et les perceptions agissent sur l’imaginaire et affectent, ainsi, la gestualité. Ces recherches sur une motricité inventive, intimement liée au monde sensoriel, se nourissent de la méthode « Body Mind Centering » et de l’intérêt que porte la chorégraphe sur des états de corps qui tendent vers l’étonnement et l’indéfinissable.

Le dispositif de ce solo est aussi simple qu’il est complexe. Deux poèmes du poète d’avant-garde, d’origine roumaine et d’expression française se font entendre :  » Quart d’heure de culture métaphysique  » (Héros-Limite, José Corti, Paris, 1987) et  » Le rêve en action  » (Le chant de la carpe, José Corti, Paris, 1986). En dialogue avec eux, à contretemps, au plus loin du figuratif et au plus proche de l’abstraction, le corps cherche une manière précise de se mouvoir qui puisse rendre compte de la plasticité et de l’étrangeté de la langue de Ghérasim Luca, tout en gardant sa propre autonomie. Le travail sur la lumière de Yann Le Bras participe à ce dispositif en instaurant un cadre ; il délimite un espace plastique que le corps peut utiliser pour apparaitre, disparaitre ou s’y dévoiler en partie. Cela donne mieux à voir la beauté défigurée et inquiétante du geste dansé et résonne avec la façon dont Ghérasim Luca fouille, sculpte et taille la langue française, la rendant autre.

L’enjeu de ce solo, sondé à deux avec Laurent Goldring, est d’observer le corps en train de chercher et de répondre aux perceptions motrices, sonores et spatiales. Cela prend la forme d’une mue progressive qui affirme, dans le peu, des états de déséquilibre ou d’invraisemblance qui font émerger un corps saugrenu. En répondant aux perceptions, vécues comment autant de possibles et de contraintes, et tout en cherchant à être dans le moindre détail du mouvement, l’objectif de ce solo est de présenter un corps inqualifiable, à la fois concis et indéterminé, farfelu.

Cet objectif se réalise, en effet, en écho avec le singulier travail de Ghérasim Luca sur les mots, dont la plasticité est ici traduite en geste. A l’écoute de la tension qui traverse cette langue entre concret et abstrait, ainsi qu’entre littéralité et connotation, la danse devient la monstration sensible et dépouillée de la parole insolite du poète. Elle entretient avec elle plutôt un rapport rythmique que d’exemplification : elle répond aux mots moins par l’entrée du sens et davantage par celle du rythme – rythme des répétitions, des allitérations et des jeux de mots. Tout cela sans être en quête d’un système, mais en accueillant et en écrivant les hasards de la perception, ainsi qu’en recherchant des associations par contraste, pour mieux danser l’absurde des êtres et des lettres qui habite ces poèmes. Dire l’étrangeté de la langue, déplier l’étrangeté du corps, ressemble, après tout, à un jeu drôle et fugace sur l’indicible étrangeté de la condition humaine.

Texte de : Valentina Karampagia

PRESSE : article de Gérard Mayen – 10/2016

… Un rigoureux, affolant et délicieux précis d’écriture insolite du mouvement dansé…

http://www.dansercanalhistorique.fr/?q=content/ouvrir-le-temps-perception-d-eva-klimackova-et-laurent-goldring

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